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Stupéfiant
19 décembre 2007

Pro-ces-sus.

Chez nous, avant, il n'y avait pas de marketing. Enfin, non, pas tout à fait. Il y avait du marketing, mais tout pleins de petits bouts partout, pas coordonnés. Bref, le bordel. Alors un mec est arrivé et a dit "Fini le bordel", on va unifier le marketing. Toutes les divisions, tous les pays, le même marketing. Et ainsi fut la Forward Marketing Division, Forward étant le nom du plan quinquenal lancé chez nous pour réduire les coûts, augmenter les profits et sortir des produits plus rapidements, enfin, au moins, les sortir, c'est déjà bien. Pour faire adhérer à Forward, on a même offert aux employés des magnets avec des slogans du type "pensez simple", "lancez-vous", "créez facile"... En clair : arrêtez des faire des bouzins qui ne sortent que dans dix ans et qui ont des siècles de retard.

Bon, ok, maintenant, on a la division, cool... OK, bon, euh... maintenant, il nous faut les mecs. Bon, on embarque les copains, on débauche à droite à gauche... A la fin, ça fait une équipe. Tip top nickel chrome grand maître. Ensuite, on pique des projets à droite à gauche ; ça permet de lancer la machine un peu plus rapidement. Mais, comme on voudrait éviter la multiplication des projets, on les fait converger et on les agrège. Du coup, les projets deviennent gros et difficiles à piloter.

Alors arrive - roulements de tambour - le processus ! Et chez nous, comme tout à un nom, on l'appelle le Just In Time, JIT pour les intimes. C'est la processus miracle, la solution qui garantit les délais de livraison en fixant un cadre organisationnel aux projets. Le JIT est découpé en jalons, appelés J suivi d'un numéro. Le J-1 marque le début de l'étude d'opportunité. Ensuite, vient le J0 pour la phase de spécifications. Le J1 permet de lancer les développements puis les qualifs. Le produit est prêt ? Passons un J2, au moins pour faire un lancement pré-commercial. Puis un J3 quand vous êtes vraiment prêts.

Bien sûr, chaque jalon s'accompagne d'un grand nombre de documents, seuls garants de la bonne communication entre entités et du passage des jalons en bonne et due forme. Du PowerPoint d'abord, pour expliquer l'idée. De l'Excel ensuite, pour avoir un max de blé. Et du Word enfin, beaucoup de Word pour spécifier, tester, modifier, annuler, expliquer. Au final, on passe bien plus de temps à dire ce qu'on va faire qu'on ne passe de temps à faire. On s'éloigne de la consigne de départ : faire simple et vite, on est même à l'opposé.

Grande est l'envie de dire que le processus est un mal nécessaire, que sans ces documents, il n'y a pas de trace écrite pour engager les parties impliquées dans le projet, pas de suivi, rien. C'est vrai, en partie seulement. Car ce processus n'est pas unique dans mon entreprise, il se décline en autant de fois que d'entités impliquées dans le projet. Vu de loin, ça ressemble à un plat de spaghettis. Un enchevêtrement de roadmaps qui se superposent dans un ordre mal connu et qui glissent sans cesse, faute d'avoir pu établir un mécanisme de synchronisation de tous ces processus. Et tout lien entre deux spaghettis s'accompagne de son lot de documents plus ou moins obsolètes, mis à jour, lus ou pas...

Le processus, tellement lourd et omniprésent finit par prendre le pas sur le travail effectif. On passe plus de temps à dire ce qu'on fait ou ce qu'on va faire qu'à faire vraiment. Nos outils bureautiques sont-ils vraiment adaptés à nos besoins actuels ? J'ai un doute.

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